[m] the violence in your heart - libre

Elle avait trop bu. Encore une fois. À force, ça devenait une vilaine habitude, un cercle vicieux dont elle était incapable de sortir. Chaque fête lui rappelait celle où on avait abusé d’elle, et le seul moyen qu’elle ait trouvé pour oublier, c’était de noyer ses pensées dans la bière et le fort. Un cocktail dangereux et destructeur, mais duquel elle était incapable de se passer pour profiter pleinement de sa soirée. De quoi la rendre encore plus vulnérable qu’elle ne l’était déjà, elle en était consciente. Heureusement qu’il y avait Carson pour veiller sur elle, pour la suivre à la trace et pour s’assurer que tout irait bien. Heureusement qu’il était là, car plus souvent qu’autrement, c’est lui qui la ramenait chez elle et qui la bordait dans son lit. Ce soir-là ne différait pas tellement des autres. L’état d’ébriété de son amie était flagrant, et, incapable de voir la belle se débattre avec son propre équilibre, il l’avait porté dans ses bras tout au long du chemin du retour, dans les sentiers du campus. Sa tête s’était refugiée dans le creux de son cou, et elle humait son odeur, un parfum à la fois doux et amer qu’elle n’avait vraiment remarqué chez lui. Une odeur qui se cachait surement, d’ordinaire, sous les relents de cigarette qu’il avait l’habitude de fumer loin de son joli nez.  Ils eurent tôt fait d’arriver chez elle, et il grimpa les marches jusqu’à l’étage où se trouvait sa chambre, malgré l’effort que cela lui imposait, avant qu’il ne la dépose sur son lit. Ce soir-là, elle ne se mit pas à roupiller instantanément, une fois sa tête posée sur l’oreiller. Elle chercha à la retenir quand il fit un geste pour se relever, sa main se faufilant avec l’adresse d’une désœuvrée jusqu’à l’arrière de son cou, et elle l’attira vers lui afin de capturer ses lèvres dans un baiser qui n’avait rien de chaste. Au contraire. Il fut tenté de céder. De répondre aux caprices de son amie, de rejoindre son lit et de laisser les choses se faire. Mais il savait qu’elle regretterait, le lendemain. Et que lui aussi, par la même occasion. Ça n’avait jamais été ainsi entre eux, et ce n’était ni l’endroit, ni le moment pour que ça change. « I can’t do this, Tilda. I’m sorry... » qu’il parvint à lui glisser tout bas, lorsqu’il eut récupérer sa bouche au fruit de grands efforts de sa part. « You’re not even you, you won’t remember a thing in the morning. » Elle s’objecta. « That’s not even true! » Sa mine boudeuse, fortement exagérée, ne faisait que lui confirmer le contraire. L’alcool gachait tout, comme toujours. « Sleep well, I’ll be back in the morning with coffee and breakfast. » Il posa un dernier baiser sur son front, se releva et s’éloigna sans un regard en arrière. Il ne se retourna que lorsqu’il eut franchit le seuil de sa chambre, afin de scruter la jeune femme une dernière fois en refermant la porte. Elle s’était endormie. Demain matin, lorsqu’il viendra la voir pour la levée des corps, elle allait avoir tout oublié. Mais le souvenir de cette soirée, de ses douces lèvres contre les siennes, continuerait de le hanter.